Hors-série N°9

VOUS N’IMAGINEZ PAS LE POUVOIR DE LA PAROLE

La parole se prend, se coupe, se reprend, elle s’écoute, s’échange, se monopolise, elle se donne, se retient, se livre, se compte, se consigne. Bref, l’art oratoire est un sport de combat. Le problème, c’est que nous montons trop rarement sur le ring. Ce sont toujours les mêmes qui parlent.

Vous les connaissez bien, ces collègues qui s’expriment trop en réunion, ces ami(e) s qui monologuent quand vous prenez un verre au bar, ces expert(e)s – vus et revus –qui interviennent sur les plateaux télé. La bonne nouvelle ? Parler, débattre, convaincre, chacun(e) peut l’apprendre.

Pour quoi faire ? Maîtriser la rhétorique, cet ensemble de procédés constituant l’art du bien dire, ça sert à quoi ? À briller sur les estrades, dans les hémicycles parlementaires ou les meetings politiques ? Détrompez-vous. L’éloquence est bien plus quotidienne que ça. Que diriez-vous de savoir contrer les arguments de votre patronne qui rechigne à vous augmenter ? Et si vous saviez négocier avec votre enfant buté devant son assiette ? Et quid de trouver une fois pour toutes le truc pour être toujours suivi(e) en réunion ou clouer le bec à un vieil oncle xénophobe ? Les règles de la rhétorique, ce sont des munitions pour chaque petit combat quotidien.

Que les timides ne se découragent pas, savoir manier la rhétorique, c’est utile aussi quand on écoute. Pour détecter les syllogismes manipulateurs, repérer les prémisses erronées d’un raisonnement qui semble rigoureux, pour résister aux hyperboles émotionnelles qui aveuglent la raison. Afficher ces procédés au grand jour est souvent suffisant pour prendre le dessus en réunion, dans une dispute ou pour neutraliser les fake news. La parole est un pouvoir. Prenez-la ou les autres s’en chargeront.

Julie Desrousseaux, rédactrice en cheffe adjointe