Un État sachant loger
À quoi sert l’État ? Que doit-il faire ? Que peut-il faire ? Que doit-il être le seul à faire ? Que ne doit-il surtout pas faire ?
Ces questions que côtoient les élèves de SES sont aussi vieilles que l’État lui-même et alimentent depuis quelques siècles des débats enflammés entre économistes, d’un côté les interventionnistes, de l’autre les adeptes du laissez-faire. La juste réponse se moque autant des frontières idéologiques factices que des automatismes administratifs. Pour nous, l’État idéal ressemblerait à ceci : solidaire (pour garantir la cohésion sociale), pragmatique (pour apprendre de ses erreurs), ramassé (pour servir le pays sans l’étouffer) et puissant (pour pouvoir faire ce qu’il dit).
Le débat sur la raison d’être de l’État, nous l’avons ouvert souvent. En décembre dernier, nous nous demandions par exemple si le meilleur moyen d’aider les familles, c’était, pour l’État, de conduire des politiques natalistes. Dans ce n°58 de février, en plein cœur de l’hiver, nous nous penchons sur la politique du logement et sur l’inextricable casse-tête que constitue cet impératif : en France, chacun devrait être logé décemment. C’est un droit (p.21). Pour y parvenir, faut-il construire plus, remplir mieux ou rénover d’abord ? Ou tout faire en même temps ?
L’État français mène des politiques coûteuses qui visent beaucoup d’objectifs différents et engendrent de nombreux effets pervers (p.18). Sous leur forme actuelle, par exemple, les APL sont accusées de contribuer à la hausse des loyers. Faut-il pour autant les supprimer (p.24) ? Attention, d’ailleurs, au contrôle des loyers, leur effet boomerang (p.31) peut être terrible.
L’État ne maîtrise pas tout. Les prix de l’immobilier vont et viennent, grisant ou déprimant les propriétaires dont le « ressenti » psychologique finit par prendre une dimension macro-économique. C’est le fameux « effet de richesse », tantôt levier de croissance, tantôt catalyseur de récession. De leur côté, les organismes qui gèrent les HLM (p.23) sont pris entre deux feux : leurs coûts grimpent, mais leurs loyers sont bloqués, voire forcés à la baisse.
Dans le budget des Français, le logement occupe une part croissante et parfois écrasante. Les jeunes, en particulier, cherchent et trouvent des moyens innovants (p.26) d’habiter sans se ruiner. Par exemple en consacrant une partie de leur temps à de la présence auprès des personnes fragiles. Qu’ils sachent que le problème de l’accès au logement est mondial, comme en témoigne l’odyssée d’un couple de Zhengzhou (p.28), en Chine, un pays où on construit à la fois trop et… pas assez.
Bonne lecture.
Stéphane Marchand
Rédacteur en chef